Les taux grecs et portugais, en s'envolant, ont engendré des arbitrages en faveur d'autres emprunts de la zone euro, notamment les bunds allemands. Mais aussi au profit des Notes fédérales américaines, dont le 10 ans est retombé à un rendement de 3,75% environ. En pleine crise des déficits, le pays au monde le plus endetté (les Etats-Unis) est donc jugé le plus sûr... Chacun peut mesurer l'ironie d'une telle situation. Même la France profite marginalement de la crise grecque, ce qui rappelle une nouvelle fois qu'au pays des aveugles les borgnes sont évidemment rois...
Si l'on prend cependant du recul vis à vis des marchés de taux, les éléments à mettre en valeur sont plus logiques et rationnels. Il y a eu constitution d'une énorme bulle obligataire depuis le krach Internet et le crédit trop bon marché mis en place par Alan Greenspan, ex-président de la Fed. Actuellement, on peut sans doute estimer que la crise grecque ne constitue que le tout premier pas vers l'éclatement de l'énorme bulle obligataire qui a commencé à se former il y a dix ans et que la crise des subprime a poussé vers des extrêmes absurdes (2% de rendement au plus bas en 2008/2009 sur le 10 ans US).
On trouve que la Grèce ne peut plus emprunter avec des taux 2/3 ans à 12% et des taux 10 ans à presque 10% ? Disons plutôt que, compte tenu de l'état de ce pays, ces taux ne sont "historiquement" pas si élevés que cela. Que la Grèce s'en retrouve en faillite est une autre histoire...
Le mouvement de rééquilibrage des taux d'intérêts nous semble donc en marche et, bien entendu, il ne faut donc pas juger de ce point de vue que les situations grecque ou portugaise soient à cet égard absurdes. Cela manifeste simplement d'un premier pas vers le dégonflement de la bulle générale.
Le 10 ans US se retrouve sous les 3,80/4%, zone de résistance déjà mentionnée. Il est évident que cela ne peut pas durer et que les taux US sont appelés à monter, sans doute fortement. Un pays aussi endetté pourrait-il se permettre d'avoir des taux bientôt voisins de ceux de l'inflation ? C'est impossible, quand la moyenne historique se situe 2,5 à 3 points de pourcentage au-dessus. Et c'est une moyenne... Comme nous somme au tout début d'un mouvement de rééquilibrage, il est évident, comme sur tout marché, qu'après avoir exagéré à la baisse des rendements on va exagérer à la hausse. Par conséquent, juste pour donner un repère très grossier, on pourrait estimer que les taux US devraient se situer vers 7/8% et, en exagérant, vers 10/12%. Où en seraient alors les taux grecs ? Vers 20 ou 25% au minimum...
L'intérêt d'apprécier correctement l'évolution des taux d'intérêts dans les pays occidentaux, c'est parce qu'ils sont déterminants dans l'évolution économique future, y compris pour les ménages. Aujourd'hui, on peut acheter une maison en Europe ou aux USA en empruntant sur 10 ou 15 ans à moins de 4% d'intérêts par an. C'est terminé ! Au cours des mois et des années à venir (car il faut raisonner en années et pas seulement en mois, même s'il y a des crises d'accélération à tel ou tel moment), il faudra payer deux à trois fois plus cher "au minimum" les intérêts des emprunts contractés.
Un tel schéma nous est donné par la montée en puissance du mauvais carré Uranus-Pluton (renforcé cette année par le carré Saturne-Pluton) qui va plomber les économies au moins occidentales jusque vers 2015/2017 et globalement jusque vers 2020 (hormis le passage positif de reprise actuelle jusque vers 2012 bien entendu, celui-ci n'étant bien sûr pas remis en question). La crise des déficits et des taux d'intérêts ne fait donc que commencer car elle va durer de longues années. Les pays endettés en payeront bien sûr le prix fort, mais même des pays peu ou moins endettés vont subir le renchérissement du coût de l'
argent.
La crise grecque actuelle peut donc paraître constituer un vrai drame aujourd'hui. Elle l'est, bien entendu, car ce pays (d'autres aussi...) a pris l'habitude de l'argent facile et surtout de le dépenser sans compter. Mais sur le fond et en prenant le recul à notre avis nécessaire, il s'agit simplement du début d'un retour à la normale au plan des marchés de taux. Mais bien sûr, il y aura d'autres Grèce et d'autres drames épouvantables...